Du consentement à l'engagement
Pour lancer le Phare de l'Ouest, le pôle innovation vous présente une série de chroniques sur l’engagement des usagers et de leurs proches.
Voici la première chronique qui traite de l'engagement et de l'équilibre précaire entre droits et responsabilités.
Pour lire l'introduction, c'est ici: L'engagement de la clientèle et leurs proches - introduction
Quelle est la différence entre consentement et engagement?
Pour mieux comprendre le lien entre consentement et engagement, nous allons examiner le parallèle entre le consentement aux soins et le consentement aux relations intimes. Un consentement à une relation intime doit être donné librement et avec enthousiasme, doit être discuté de façon continue et peut être retiré à tout moment. Pour la majorité des personnes équilibrées, le consentement de notre partenaire n’est pas suffisant. En réalité, on souhaite davantage un partenaire qui participe activement et s’investit dans la relation. Un partenaire qui exprime ses préférences, fait des choix, des propositions. C’est bien plus agréable qu’un partenaire qui acquiesce passivement, non? Pourquoi est-ce qu’on se contenterait d’un consentement lorsqu’il s’agit de soins et de services? Est-ce suffisant d’obtenir le consentement de l’usager? |
Consentement
L'évolution du consentement
La majorité des orientations actuelles en matière de consentement découlent du Code de Nuremburg. Dans la période entourant la Seconde Guerre mondiale, des médecins allemands ont été accusés de pratiques médicales non-éthiques après avoir réalisé des interventions forcées sur des personnes dans une visée d’«hygiène raciale».
Les critiques entourant les procès de ces médecins sont à l’origine de l’élaboration de principes qui guident aujourd’hui la recherche clinique. Dans les années 1970, le consentement s’est étendu aux pratiques cliniques et oblige les cliniciens à divulguer l’ensembles des risques et bénéfices associés aux interventions proposées. Initialement, la notion de consentement aux soins concernait principalement les interventions chirurgicales. Malheureusement, l’imputabilité de ces pratiques était basée sur l’obtention d’une signature, beaucoup plus que sur la réalisation d’une réelle démarche de prise de décision éclairée, après exploration des alternatives. |
Je signe, donc je consens?
Ainsi, de nos jours, la perception que le consentement est une signature à obtenir persiste. Le consentement est bien plus complexe qu’une simple signature. Comme pour les relations intimes, la personne doit être en mesure de consentir. Il faut donc apprécier sa capacité à consentir (pour en savoir plus). Le consentement à des soins et services doit être donné librement, sans pression ni influence. Il doit être éclairé : la personne qui consent doit être informée des risques et bénéfices de toutes les alternatives possibles en lien avec sa condition, incluant ceux associés à une absence d’intervention. Finalement, le consentement doit être donné en continu et peut être retiré à tout moment.
Du consentement à l’engagement
L’obtention du consentement assure le respect des droits des personnes utilisant les soins et services. Mais la gestion de la santé et du bien-être des personnes ne repose pas que sur les soins et services que nous pouvons leur offrir. Une personne passe en moyenne trois heures par année en interaction avec des professionnels de la santé. Elle est la principale responsable de gérer sa santé pour les 8757 heures restantes. (Coulter, 2015)
Dans un monde où les conditions chroniques se multiplient, la santé et le bien-être de la population reposent principalement sur les saines habitudes de vie, les activités de prévention, l’autosurveillance et l’autogestion des conditions de santé ainsi que la bonne utilisation des services. L’engagement des usagers est la clé!
J'ai des droits!
La ou le patient engagé démontre une forte motivation à développer des connaissances et détenir plus de pouvoir dans la relation avec le professionnel. Il ou elle a un désir et une capacité de choisir activement de participer dans les soins et services d’une façon unique et spécifiquement appropriée à sa situation, afin d’optimiser les impacts et l’expérience des soins et services reçus. (Higgins et al., 2017; Tobiano et al., 2021)
L’engagement se définit comme la forme la plus active de participation des usagers. Il va bien au-delà de l’observance thérapeutique (compliance) et de l’adhésion au plan de traitement. Dans les dernières décennies, on a introduit les notions de prise de décision partagée et de partenariat avec les usagers.
- La prise de décision partagée est « une approche par laquelle, lorsque vient le temps de prendre une décision, les cliniciens et les patients partagent les meilleures données disponibles tout en encourageant les patients à examiner les différentes options, afin d’en arriver à une décision conforme aux préférences des patients ». (Thériault et al., 2019)
- Le partenariat est une approche qui repose sur la relation entre les usagers, leurs proches et les acteurs du système de santé et de services sociaux. Cette relation mise sur la complémentarité et le partage des savoirs respectifs, ainsi que sur la façon avec laquelle les divers partenaires travaillent ensemble. Plus précisément, la relation favorise le développement d’un lien de confiance, la reconnaissance de la valeur et de l’importance des savoirs de chacun, incluant le savoir expérientiel des usagers et de leurs proches, ainsi que la co‐construction. (MSSS, 2018)
J’ai aussi des responsabilités
Cependant, toutes ces approches demeurent centrées sur le respect des droits des usagers. Le concept d’engagement vient introduire la notion de responsabilité. L’usager prend donc davantage de contrôle et de responsabilité dans la gestion de la maladie, de sa santé et dans l’utilisation des services à sa disposition.
En effet, l’usager (et ses proches) a des responsabilités:
- Envers sa personne
- Prendre des décisions, faire des choix en lien avec sa santé et les options thérapeutiques
- Adopter des comportements plus sains
- Réaliser des actions de prévention, de surveillance ou d’autogestion de sa santé et son bien-être
- Envers les autres personnes utilisatrices des services
- Respecter la confidentialité des interventions
- Respecter des rendez-vous
- Envers le personnel qui lui offre des services
- Avoir des interactions respectueuses
- Communiquer ses besoins
- Contribuer à un milieu de travail sain et sécuritaire
- Envers l’établissement et le réseau dans son ensemble
- Utiliser judicieusement les services
- Utiliser adéquatement les équipements fournis ou prêtés
L’engagement est donc le terme parapluie qui englobe toutes ces approches (cliquer sur l'image pour l'agrandir).
L’engagement, ça se cultive!
Ne serait-ce pas merveilleux si tous nos usagers étaient pleinement engagés dans la gestion de leur santé et de leur bien-être? Et vous, qu’attendez-vous de vos usagers? Comment faites-vous pour soutenir leur engagement?
Vos réponses nous intéressent. Laissez-nous un commentaire pour nous faire part de vos réflexions. Elles pourraient alimenter une prochaine chronique!
Dans les prochaines chroniques, vous découvrirez différentes facettes de l'engagement dans le but de le favoriser chez la clientèle et de leurs proches:
- INTRODUCTION - L'engagement de la clientèle et leurs proches
- CHRONIQUE 1 - Du consentement à l’engagement : un équilibre précaire entre droits et responsabilités (vous êtes ici!)
- CHRONIQUE 2 - Des stratégies prometteuses pour mieux soutenir l’engagement
- CHRONIQUE 3 - L’engagement, une solution à nos défis?
Le sujet vous interpelle? Vous aimeriez mettre en place des stratégies innovantes pour cultiver l'engagement de votre clientèle? Écrivez-nous en cliquant ici.
Qu'est-ce que le Phare de l'Ouest?
Le Phare de l'Ouest est constitué de chroniques portant sur des thématiques toutes aussi intéressantes les unes que les autres ayant un point en commun: l'innovation.
Pôle Innovation, Direction de la recherche, de l'innovation et de l'apprentissage (DRIA)